CHRONIQUES DE LAURENCE JAMOTTE

10 Avril 2000-Belgique: lorsque les "flics" déraillent...
Vendredi, quelque 900 gendarmes ont manifesté à Bruxelles, la capitale belge, pour protester contre l’accord de principe sur le futur statut policier, auquel étaient parvenus le ministre de l’Intérieur et les quatre syndicats reconnus des policiers, gendarmes et péjistes.
Bien que le cortège était globalement calme, des incidents ont gravement terni la manifestation. Deux automobilistes ont en effet été malmenés par les forces de l’ordre. La cause de l’incident ne semble pas pouvoir excuser les gendarmes. Bloqués dans leur voiture et dans la manifestation, les victimes, deux jeunes hommes, d’origine étrangère, ont klaxonnés afin de continuer leur route.
La réponse ne s’est fait attendre. Le coup de klaxon, mais on peut aussi sans doute ajouter le faciès des automobilistes, ont provoqué la colère tout à fait démesurée d’un manifestant puis de plusieurs de ses confrères.
Visiblement, selon les images de la scène, diffusées par la chaîne de télévision francophone privée (RTL-TVI), et les témoignages des victimes, les « flics » échaudés par les bières qu’ils avaient engloutis et excités par le malaise qui ronge leur profession, s’en sont pris violemment et d’une manière scandaleuse aux deux automobilistes.
Alors que l’image de marque des forces de police avait déjà fortement souffert lors de l’affaire Dutroux, puis lors du décès de Sémira Adamu, alors que les "flics" sont extrêmement mal perçus par les jeunes, et en particulier auprès des jeunes d’origine étrangère, la démonstration de force, que toute la Belgique a pu voir au journal télévisé, a encore agrandi le fossé.
Certes, l’incident n’est peut-être qu’un phénomène isolé, non représentatif du travail qu’effectuent chaque jour les forces de l’ordre. Certes, il ne faut pas céder à la diabolisation. Mais les pouvoirs publics devraient s’inquiéter sérieusement des éléments racistes qui "œuvrent" au sein de la gendarmerie et de la police.
L’information n’est pas vraiment neuve. L’on sait depuis quelque temps déjà que certains membres des corps de police et de gendarmerie usent de leur képi pour procéder à des actes qui n’ont rien à voir avec ce pourquoi ils ont été engagés. Peut-on par ailleurs considérer que Johan Demol, ancien commissaire désormais « homme politique » au service du Vlaams Blok, un parti xénophobe et d’extrême droite, n’est qu’une exception ?
En tous cas, suite à l’incident de la semaine dernière, il sera encore davantage complexe de convaincre les jeunes de respecter la loi quand les représentants de celle-ci la bafouent à la première occasion. Il sera difficile de leur faire croire que les "flics" représentent surtout un service d’aide à la population.
La démonstration de force, commise vendredi par quelques "flics" révèle un malaise et jette le discrédit sur toutes les forces de police. Quand quelques flics déraillent, c’est toute la profession qui en prend un coup et surtout tous les jeunes qui commettent un délit de sale gueule...

©Laurence Jamotte, 2000.